Virtuose d’une dextérité, d’une rapidité et d’une expressivité incomparables et doué d’un immense talent pour des grandes compositions, Oscar Peterson se démarque comme un des plus grands pianistes de jazz de tous les temps.
Rares sont les musiciens de jazz à avoir connu un succès aussi éclatant que celui de cette légende canadienne. La carrière de ce pianiste de jazz et compositeur renommée internationale, s’étend sur plus de 60 ans.
Le talent de Peterson ouvert la voie à d’autres légendes canadiennes de jazz sur la scène musicale internationale comme Oliver Jones, Joe Sealy, Maynard Ferguson, Ed Bickert et tout récemment la chanteuse de jazz canadienne contemporaine Diana Krall, tout en inspirant aussi des musiciens du monde entier. Sa réputation internationale ne l’a toutefois jamais empêché de rendre hommage au Canada par le biais de plusieurs compositions dédiées à sa patrie, ou de consacrer son temps et ses efforts à des entreprises éducatives conçues pour favoriser la croissance et le développement de jeunes talents canadiens.
Né à Montréal le 15 août 1925, Oscar Peterson est le quatrième d’une famille de cinq enfants. Ses dons musicaux furent vite découverts et encouragés par son père, qui était bagagiste pour le Canadian Pacific Railway et qui apprit le piano de façon autodidacte dans la marine marchande.
Lors de son éducation secondaire, Oscar étudia avec Louis Hooper, un Canadien qui connaissait bien la scène du jazz de Harlem ayant vécu là, et avec le pianiste Paul de Marky. Tous les deux lui soulignèrent l’importance de la technique et de la confiance en soi. Oscar Peterson fut alors inspiré par Teddy Williams, Nat King Cole, James P. Johnson et, surtout, Art Tatum. En fait, le jeune musicien avait été si impressionné et intimidé par un disque de Tatum trouvé dans la collection de son père, qu’il ne retourna pas à son piano pendant plus d’un mois.
Oscar Peterson n’avait que 14 ans lorsqu’il remporta les honneurs d’un concours amateur national de la CBC pour lequel il avait auditionné à la suggestion de sa sœur Daisy, qui allait elle-même devenir professeure de piano réputée à Montréal. Il fut ensuite invité régulièrement à participer à l’émission radiophonique montréalaise Fifteen Minutes’ Piano Rambling et à The Happy Gang de la Télévision de la CBC.
En 1947, Norman Granz, réalisateur de la série de concerts et d’enregistrements Jazz at the Philharmonic, entendit Peterson et son trio en direct de l’Alberta Lounge à la radio, alors qu’il était à bord d’un taxi en direction de l’aéroport de Montréal. Le réalisateur ordonna immédiatement au chauffeur de le déposer à l’Alberta Lounge pour entendre l’artiste sur place. La rencontre entre les deux hommes fut le début d’une relation qui allait durer toute leur vie.
Granz offrit au pianiste la chance de se produire à titre de vedette surprise au fameux Carnegie Hall, où Peterson présenta éventuellement un numéro brillant avec le contrebassiste Ray Brown, ce qui amena le réalisateur à offrir à Peterson un poste permanent au sein de Jazz at the Philharmonic.
Le jeune musicien fit d’importantes tournées aux États-Unis avec la compagnie et finit par former le Oscar Peterson Trio avec Brown et le guitariste Herb Ellis. Les trois musiciens se motivaient et s’inspiraient sans cesse mutuellement. Malgré les exigences des tournées et des enregistrements, les musiciens de l’époque se bousculaient pour faire partie du célèbre trio par désir de travailler avec Peterson et de s’associer à sa vision et à son talent.
Tout au long de sa carrière, Oscar Peterson enregistra plusieurs centaines d’enregistrements en solo ou en groupe. Il a aussi collaboré avec des sommités comme Ella Fitzgerald, Louis Armstrong, Count Basie, Stan Gentz et plusieurs autres. Il n’a jamais enregistré ni joué avec son idole Art Tatum, mais les deux hommes se sont éventuellement liés d’amitié.
En plus d’être un brillant pianiste, Oscar Peterson est un compositeur de talent. Une de ses premières compositions majeures a été Hymn to Freedom (1962), une œuvre de protestation qui allait devenir un hymne du mouvement des droits civils. Il décrit lui-même sa pièce la plus connue, Canadiana Suite (1963), comme un « portrait musical du Canada que j’aime. » Une autre de ses œuvres, Fields of Endless Day (1978), est la musique d’un film sur le voyage des esclaves noirs américains qui s’enfuirent au Canada grâce au Chemin de fer clandestin. City Lights (1977), une œuvre composée pour les Ballets Jazz de Montréal, est une valse sur le thème de la ville de Toronto. Le film d’animation Caprice en couleurs du cinéaste canadien Norman MacLaren fut également réalisé sur une musique d’Oscar Peterson.
On remarque parmi les autres compositions du pianiste les œuvres African Suite (1979), A Royal Wedding Suite (1981), Easter Suite (1984) et The Trail of Dreams Suite (2000), composée pour le Sentier transcanadien. Il a écrit des pièces pour Bach 300, les Jeux olympiques d’hiver de 1988 à Calgary, l’ouverture du SkyDome de Toronto et d’innombrables films et documentaires, y compris The Silent Partner, film pour lequel il reçut le Prix de la Meilleure musique originale du Palmarès du film canadien en 1978.
Durant toute sa carrière, Oscar Peterson participa de diverses façons à la création et au soutien de programmes d’éducation musicaux. Que ce soit comme co-créateur et formateur de l’établissement d’enseignement Advanced School of Contemporary Music au début des années 1960 à Toronto ou à titre de chancelier de l’Université York trois décennies plus tard, il ne cessa jamais de prôner le développement des jeunes Canadiens. Il affirma : « J’ai eu la chance de connaître le succès comme musicien de jazz et c’est maintenant à mon tour d’utiliser cette expérience pour aider à orienter les étudiants. »
Oscar Peterson reçut d’innombrables prix et de distinctions tout au long de sa riche carrière, notamment huit prix Grammy, deux prix Juno, un prix Génie, un Gemini Award, neuf prix pour l’ensemble de sa carrière présentés par diverses institutions, huit prix Temple de la renommée, 13 prix Downbeat consécutifs et 13 doctorats honorifiques. Il fut nommé officier de l’Ordre du Canada en 1972 et promu compagnon en 1984. Il reçut en 1999 le Praemium Imperiale, décerné par la Japan Art Association, devenant ainsi le premier Canadien et le premier musicien de jazz à recevoir ce prix, étant l’équivalent artistique du prix Nobel et, en 2000, le Prix international de la musique de l’UNESCO. Il fut le premier récipiendaire du Prix des arts de la scène du Gouverneur général et des timbres-poste furent émis en son honneur en Autriche en 2003 et par Postes Canada en 2005.
Oscar Peterson dut ralentir ses activités en 1993 suite à un accident cérébro-vasculaire subi lors d’un spectacle au club Blue Note de New York, affaiblissant légèrement sa main gauche. Au cours des dernières années, l’arthrite l’obligea à limiter ses spectacles, ce qui n’empêcha toutefois pas ses performances de déborder d’autant de passion et de fougue qu’il y a un demi-siècle. Oscar Peterson est non seulement un pianiste exquis et un compositeur hautement doué : c’est un être humain dont la force d’âme est incomparable.
Le 8 juin 2007, un concert hommage mettant en vedette des icônes du jazz tels Hank Jones et Clark Terry fut présenté en l’honneur d’Oscar Peterson à Carnegie Hall, la salle même où il entama sa carrière fructueuse il y a près de 60 ans. Le principal intéressé ne se présenta pas à la fête pour des raisons de santé mais, pour ses pairs parmi les grands du jazz, pour plusieurs jeunes virtuoses, pour sa famille et pour ses amis, l’événement fut une occasion unique de se rassembler en son honneur afin d’honorer et de célébrer les milles et une réalisations inoubliables de ce Canadien bien-aimé.
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